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Sa nuit avait été agitée, peuplée de rêves si forts qu’elle croyait les avoir réellement vécus. Des rêves un peu énigmatiques dont elle avait du mal à comprendre le message caché. Comme à chaque fois qu’elle avait besoin de réfléchir, Lola était partie marcher à travers les vignes.

L’air avait gardé la fraîcheur de la nuit et le soleil tardait à émerger des nuages. Il faisait chaud pourtant, lourd même. Pas un souffle d’air, pas un bruit ne venaient troubler le calme ambiant. Les éoliennes, délaissées par le vent, semblaient figées dans l’attente. Elles lui faisaient penser aux moulins à vent de Don Quichotte qui avaient animé ses nuits d’enfants. Combien de fois était-elle partie avec lui à l’assaut de ces moulins, de ces rêves que tout le monde lui disait impossibles à atteindre ni même à réaliser !

Les pensées fusaient dans son esprit en flux constant et désordonné. Elle n’essayait pas de les contrôler, encore moins de les canaliser. Elle les laissait sortir, vivre leur vie en toute autonomie. Elle savait cette étape indispensable au retour du calme. Vider son esprit pour mieux appréhender la situation, laisser les émotions s’extirper du plus profond d’elle-même, calmer le mental pour se reconnecter à son intuition et à son inspiration. Elle se laissait porter.

A un moment, ne sachant plus où elle se trouvait, elle s’arrêta pour tenter de se repérer, mais aucun chemin de vigne ne ressemble plus qu’à un chemin de vigne ! Elle n’était jamais venue là, elle en était certaine. Elle décida de continuer sur sa lancée. Au pire, elle rebrousserait chemin et reviendrait à son point de départ. Au loin, le toit d’une maison l’intrigua. Comment, des gens vivaient là, au milieu de nulle part ? Piquée par la curiosité,  elle se dirigea vers la bâtisse qui, au fur et à mesure qu’elle s’en rapprochait, livrait quelques-uns de ses secrets.

Elle se partageait en deux parties : une première qui avait dû être l’habitation, en très bon état, avec une porte verrouillée d’un énorme cadenas et une autre, contigüe, mais de hauteur différente, composée de deux locaux indépendants, qui avaient dû servir aux animaux autrefois. Sur cette partie du bâtiment, un imposant « DANGER ACCES INTERDIT » écrit à la peinture blanche était sensé repousser les intrus, mais au vu des battants ouverts, il n’avait pas grande influence… Le toit laissait entrevoir un trou béant. Lola jeta un œil dans la première grange. La nature avait repris ses droits depuis longtemps et un figuier en barrait l’entrée. Au vu des papiers et des bouteilles qui jonchaient le sol, il devait être régulièrement visité par les errants du coin.

La seconde grange et sa fameuse inscription étaient plus attirantes. Le goût de l’interdit, l’attrait de l’inconnu, la saveur du mystère sans doute… Elle mit un pied à l’intérieur et sentit de suite un frisson la parcourir. Elle se rejeta en arrière et détailla les lieux. Au fond se trouvait une de ces anciennes mangeoires en bois, sorte d’échelle montée à l’horizontale et de biais à laquelle il manquait un barreau. Dedans, point de foin pour les bêtes, juste des tuiles passées au travers de la toiture. Les herbes folles avaient commencé à coloniser le sol.

Lola se décida à entrer. Un nouveau frisson la parcourut, mais elle avait dépassé le stade de la peur. Si Esprit il y avait, elle se savait capable de lui parler et de le rassurer. Elle s’avança vers le fond de l’étable, les tuiles éparses finissant de s’émietter sous ses pieds. Arrivée près de la mangeoire, elle ferma les yeux et passa doucement sa main sur le bois. A sa consistance rugueuse, il devait avoir été posé des décennies en arrière. Soudain, sa main buta sur une entaille. Les yeux toujours fermés, elle lui fit suivre son chemin. Une lettre, puis une autre, un + et deux nouvelles lettres, et enfin un cœur. Des amoureux avaient scellé là leur amour. Prompte à se projeter dans l’imaginaire, Lola les vit, lovés dans un coin du bâtiment, bien à l’abri des regards, cachés par les bêtes, en train de se promettre fidélité pour l’éternité.

Elle ne saurait jamais s’ils avaient réussi à tenir leur serment, mais l’éternité, elle, avait conservé leur amour au creux de ce bois dont la seule utilité maintenant était de témoigner du passé. 

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